Découverte et fouilles
- En 1860 et 1861, l'archéologie Ernest Renan entreprit des
fouilles au sein de la cité antique d'Amrit, mettant ainsi au jour
un sanctuaire religieux, un village antique et également une
nécropole.
- Dans les années 50 — 1954 et 1955 — , ainsi qu'en
1965, une deuxième et troisième campagnes de fouilles révélèrent
l'ensemble de l'aire couverte par le site antique phénicien. De ces
mises en lumière, les spécialistes obtinrent une vue d'ensemble et
une perspective relativement correctes et purent ainsi établir les
plans au sol des vestiges d'Amrit.
- Les fouilles effectuées en 2003, furent marquées par la
découverte d'une galerie et d'un arc monumentaux édifiés par le
biais d'une percée à même d'un surplomb rocheux et situés en face
de stèles funéraires appartenant à la nécropole royale. Ces
vestiges monumentaux syriens sont assignables au IIe siècle.
- Plus récemment, en 2005, une quatrième série de fouilles permit
de mettre au jour un tombeau que l'on peut attribuer à l'époque
hellénistique.
- Enfin, en 2010, les dernières fouilles opérées sur le complexe
antique urbanistico-religieux sous la direction de Michel
Al-Maqdissi, mettent en évidence différents points ayant trait au
site d'Amrit, lesquels demeuraient jusqu'alors approximatifs et
flous. Notamment, l'analyse du tell sur lequel repose une partie
des vestiges archéologiques, fournit une approche globale et
détaillée des différentes étapes de l'histoire du site
antique.
Le Tell
d'Amrit
Le tell — c'est-à-dire, une formation en monticule induit
par la superposition de plusieurs strates architecturales d'époques
différentes —, est localisé à l'est du sanctuaire appartenant
au site d'Amrit. Grossièrement, il se présente sous la forme d'un
carré de 110 mètres de côté. Le
promontoire artificiel est l'objet d'une analyse stratigraphique
poussée au moyen d'une tranchée obtenue par une technique
d'excavation circonscrite directement au sein du tell. L'équipe
archéologique, sous la houlette de Michel Al-Maqdissi
— actuel Directeur de la Recherche et des Fouilles de la
République Arabe de Syrie —, met en lumière de nombreuses
découvertes essentielles à la compréhension de l'histoire et des
caractéristiques architecturales du complexe antique d'Amrit. Dans
une moindre mesure, le Directeur de l'Archéologie Syrienne nous
éclaire également sur l'origine de la forme carrée de la butte
artificiel. En faisant appel à une méthodologie par étude
comparative, il démontre que cette dernière serait à imputer à une
culture de typologie amorite.
- Il est attesté que le site phénicien n'a jamais subi de
développement urbanistique. Les analyses stratigraphiques
démontrent également qu'Amrit n'a été l'objet d'aucune sorte de
processus d'hellénisation.
- Dans un second temps, on peut mettre en évidence que le tell,
lequel est pourvu de 9 strates
distinctes, recouvre neuf périodes chronologiques différentes.
Incidemment, le tell représentant un témoin, voire un
échantillon du site d'Amrit, on peut en conclure que ce dernier est
gradué de neuf époques s'étalant sur une vaste amplitude
chronologique.
Périodes chronologiques du
site
Factuellement, la mise au jour du tell et l'étude des
différentes couches chronologiques, permet d'appréhender une
datation approximative — mais scientifiquement attestée —
de la fondation du complexe antique jusqu'à son abandon.
- Le début du IIIe millénaire av. J.-C. marque les premières
attestations de présence humaine.
- La deuxième phase chronologique s'échelonne de -2600 à -2500;
elle survient au cours du processus dit de deuxième révolution
urbaine. Les nombreuses céramiques retrouvées in situ du
tell fournissent un indice concret venant étayer ce postulat.
- La troisième période chronologique recensée est assignable au
début du IIe millénaire av. J.-C.. Cette dernière correspondrait à
l'occupation de l'aire du site et de ses alentours, par une
dynastie amorite. Les vestiges mis au jour de constructions
murales ouvragées au moyen de roches taillées, mais également de
tombes s'élevant sous forme de cylindre, témoignent de cette
occupation. En outre, la découverte de diverses reliques
appartenant à la même époque, viennent renchérir les édifications
architecturales ajourées: des haches caractérisées par leur
ouvertures travaillées au sein de la lame; des céramiques à boire
cannelés particularisées par une couche externe
façonnée de métal, ou encore des cruches ovales lissées et pourvues
d'un aspect brillant.
- Aux environs de -1500 / -1200, on observe une extension du
village d'Amrit. Les nombreux vestiges d'habitats dotés de
surface en terre battue, couplés à la présence de poteries autochtones,
lesquelles se présentent de manière épurée, lissée et alternant une
stylistique figurative à une stylistique de pigmentation. Cette ère
chronologique est à attribuer à la prééminence cananéenne au sein
de la région dans laquelle Amrit s'inscrit.
- La cinquième phase a pour occurrence les environs de 1175 av.
J.-C. Cette période se matérialise par une strate composée
d'éléments charbonneux et relativement mince. D'après Michel
Al-Maqdissi — lequel a procédé à l'identification et
l'analyse de celle-ci — , elle serait à mettre en corrélation
avec une série d'invasions imputables aux populations méridionales
originaires du territoire proche-oriental de l'Amourrou
— c'est-à-dire une région localisée à la frontière des actuels
Liban et Syrie —.
Factuellement, ces peuples sont très probablement à l'origine de
destruction massive de sites phéniciens littoraux, dont celui
d'Amrit.
- La sixième prend place à la conclusion du IIe millénaire av.
J.-C. et au commencement du Ier millénaire av. J.-C.. Celle-ci se
distingue par une émancipation géopolitique des comptoirs
phéniciens de côte nord-syrienne. Cette modification régionale se
concrétise par la présence de maints sites d'extraction pierreuse
d'origine calcaire, lesquels possèdent la particularité d'être
ajourés — à noter que lesdites pierres extraites sont
également appelées ramleh —. Cette observation
illustrerait ainsi un processus dynamique d'édification,
d'œuvrement] et, par ailleurs de stabilité territoriale.
- Au cours du Second Âge du fer proche-oriental — aux
alentours du VIIe siècle
av. J.-C. et du VIe siècle
av. J.-C. — le site côtier d'Amrit voit s'épanouir une
grande activité religieuse, que l'on peut remarquer par le biais de
nombreuses ruines d'édifications votives retrouvées in situ du tell
et se répartissant également sur l'ensemble du complexe
archéologique. Le complexe architectural phénicien devient, à
partir de cette époque, un lieu de pèlerinage majeur dont le
rayonnement s'étend sur la globalité du littoral Nord-Est
méditerranéen. En outre, on peut observer un nouveau dynamisme
d'extension du village, quand bien même celui-ci demeure
manifestement de typologie proto-urbaine.
Le
Sanctuaire d'Amrit
Comme nous l'avons remarqué précédemment, le VIe siècle av. J.-C. participe d'un essor
explicite du potentiel votif du site phénicien. C'est au sein de
cette période que le temple d'Amrit est édifié.
Le culte de Melqart à
Amrit
- Il est attesté que l'imposant sanctuaire est dédié au dieu
Melkart — également dénommé Melqart —. De
nombreuses sculptures de petite taille et divers artéfacts
religieux mis au jour in situ d'une favissæ — autrement
dit, une sorte de fosse dédiée aux objets votifs —, vient
créditer et matérialiser cette thèse. Melqart se présente telle une
divinité de culture phénicienne, dont les attributions sont
essentiellement de type céleste. On s'accorde également à le
définir comme étant le dieu protégeant la communauté d'Amrit et,
plus généralement du peuple phénicien et de son implantation au
sein de la région du littoral méditerranéen,,.
- Il est par ailleurs notable que la divinité phénicienne est
soumise à un processus d'assimilation par la civilisation grecque,
apparaissant sous les traits de la figure panthéonique hellène,
Héraclès,,.
- En dépit de cette synthèse théomorphique, au cours du
IVe siècle av. J.-C., lequel
est notamment l'objet de la conquête du Proche-Orient par Alexandre
le Grand — précisément en -333 av. J.-C. — et également
la mise en place de la dynastie des Séleucides, le culte voué à
Melqart sur le site antique d'Amrit est relativement préservé. En
outre, le temple qui lui est dédié ne subit aucun remaniement
architectural,.
- En revanche, on peut observer une sorte de régression de
l'activité cultuelle relative au dieu Melkart, que l'on peut
assigner à la fin de la première moitié du IIe siècle av. J.-C.. Il serait très
probable que ladite baisse d'activité soit la conséquence de la
destruction partielle du sanctuaire,.
Description du sanctuaire
- S'il on fait abstraction de l'apparente ruine de l'édifice
religieux, laquelle est à octroyer à une importante résurgence
sismique survenue aux alentours de -150 av. J.-C., ce dernier se
présente remarquablement bien préservé et se pourvoit d'une
excellente intégrité architecturale en regard des autres différents
temples phéniciens mis au jour,.
Néanmoins, la reconstitution du complexe cultuel s'élabore
essentiellement par extrapolation et sa restauration, compte tenu
de sa typologie architecturale originale, demeure contraignante.
Les hypothèses et conjectures émises auparavant par la Mission
Archéologique Syrienne, induiraient à penser que la vie
religieuse liée au temple aurait régressé à cette même époque de la
moitié du IIe siècle
av. J.-C.. L'expertise sismologique permettant d'établir le
schéma d'effondrement des différents éléments constituant le
sanctuaire, vient corroborer ces primes conjectures. De facto, on
peut remarquer que les blocs formant le haut des portiques, du
portail monumentale et ceux structurant le naos central, gisent
disséminés sur l'ensemble de l'aire circonscrite au temple de
Melkart, voire au-delà,.
- Le bâtiment religieux phénicien est pourvu d'une importante
creusée en terrassement à ablutions, située au centre de ce
dernier. La monumentale cuvette hydraulique se présente sous une
forme carrée, excavée à même la roche. La face septentrionale de
celle-ci, dotée d'une large saillie, vient directement se jouxter
avec le val de la rivière courant sur le site antique, la Nahr
Amrit. Il est très probable que les pratiquants vouant un culte
au dieu Melkart, s’octroieraient un rite de purification par l'eau,
in situ de l'excavation rocheuse et ce, à la suite des louanges et
dédicaces religieux.
- La construction cultuelle est agrémentée de trois portiques
encadrant une cour intérieure. Chacune des trois colonnade se
superpose à une sorte de petit gradin à un seul degré recouvrant
5 mètres de large environ. En
outre, ces dernières sont munies d'un entablement venant s'y
juxtaposer. Les colonnes constituant les portiques comportent des
fûts de type quadrangulaire — autrement dit, à quatre
angles, ou carré —, agrémentés d'une double corniche
traditionnelle sculptée et peinte — également dite gorge
égyptienne —.
On peut observer une sorte de vestibule monumental sis en façade
du temple, lequel fait office d'accès à la cour intérieure. Au
centre du temenos — c'est-à-dire l'esplanade sacrée, ou ici la
cour —, se tient un genre de cella de taille imposante et
pourvue de 2,5 mètres de hauteur;
celle-ci côtoie le bassin à ablution susmentionné. À l'instar de ce
dernier, la cella est notablement dépourvue de façade nord la
faisant également s'épanouir au-devant du lit du cours d'eau
Nahr Amrit.
- À titre de comparaison, les temples achéménides tels que celui
localisé à Byblos et également
celui appartenant au site antique de Sidon, possèdent de
réelles similitudes avec le sanctuaire d'Amrit, notamment au regard
de la conception des portiques, du vestibule d'entrée de l'enceinte
et du monumental ouvrage de terrassement destiné aux ablutions
purificatrices. À l'instar des deux temples cités ci-dessus, le
complexe votif est essentiellement constitué de blocs de pierre
calcaire de couleur ocre clair — les fameux
ramleh —. De même, la mise en œuvre architecturale
globale et la stylistique dont il est pourvu, apparaissent
relativement épurées,.
- En revanche, la cella — ou naos —, est dotée d'une
typologie architecturale propre aux sanctuaires levantins de la
période hellénistique. En ce point, le naos du temple demeure
comparable à ceux des temples de temples de Baal, ou encore de
Baalshamin, situés au sein du site antique de Palmyre. De nombreux
éléments constituant la cella, et mis au jour in situ du
bassin central, concrétisent cette proposition. Toiture plane,
propylée formé de colonne de typologie corinthienne, merlons à
degrés semblent doter ladite cella.
Les autres temples: L'existence d'un pluralisme cultuel
tardif
Outre le sanctuaire dédié à Melqart, on recense différents
édifices religieux qui s'éparpillent sur le site levantin
— dont l'un, le plus notable, est localisé à seulement
400 mètres du temple de Melkart;
on y a mis au jour in situ divers artéfacts remarquables,
tels que des situles de fabrication et/ou d'origine probablement
égyptienne. Il est attesté qu'ils sont conçus postérieurement de
celui-ci, notamment au cours du Ve siècle av. J.-C., du IVe siècle av. J.-C. et à la fin du
Ier millénaire av. J.-C.. Les iconographies votives
dédiées à d'autres divinités phéniciennes découvertes in situ ou à
proximité des ouvrages cultuels — essentiellement sous formes
de statuettes —, accréditent le postulat d'un
multi-cultualisme tardif sur le site phénicien.
Factuellement, ce dernier ayant un statut de lieu de pèlerinage, un
processus d'emprunt à d'autres formes de dévotion demeure
implicite. Cependant, la figure panthéonique phénicienne
protectrice de la ville — Melkart —, détermine la majeure
partie de la vie religieuse d'Amrit et reste incontournable,,.
Le stade d'Amrit:
un monument précurseur
Son contexte
d'érection
Côtoyant le sanctuaire dédié à Melqart sur sa façade Est, on
peut remarquer l'existence d'un stade à vocation compétitive. Les
aires d'occupation respectives des deux constructions ne sont
distinctes que par la présence du cours d'eau la Nahr
Namrit. En outre, on peut remarquer que l'ouvrage olympique
surmonte une colline peu élevée. En ce qui concerne le contexte
historique, à assigner à la fin du IVe siècle av. J.-C. — pour rappel:
mise en place de la satrapie des séleucides au proche-orient
antique —. La fondation du complexe sportif répond aux
critères et canons culturels et religieux grecs. Ces derniers
définissent, en particulier, une association systématique du temple
principal d'un site à un édifice consacré à la compétition et à
l'hygiène physique. En revanche, l'existence de ce complexe sportif
nous fournit la preuve indéniable que des compétitions phéniciennes
sont organisées antérieurement à celles, plus connues, d'origine
grecque. Cette observation suggère que la tradition d'épreuves et
de concours physiques est adoptée et assimilée à l'extérieure de la
Phénicie au cours de la seconde moitié du Ier millénaire av.
J.-C..
Une construction de
type phénicienne
- De taille modeste, le stade est pourvu de sept degrés formant
les gradins. Ces derniers sont munis d'une hauteur de 60 centimètre. Ils sont façonnés à partir de
ramleh taillés sur l'ensemble de la face septentrionale,
tandis que ceux de la face méridionale sont ouvragés dans la pierre
rocheuse.
- Sur la face orientale, on peut distinguer une convergence des
tribunes pour former un cintre — sorte de voûte, ou encore
voussoir —, lequel est pourvu de deux terminaisons faisant
office de portes d'accès. Ces deux porches possèdent chacun une
largeur de 3,50 mètres. Il
semblerait que ces deux points d'accès sont réservés au public
— on a également pu identifier une troisième porte sur la face
méridionnale, celle-ci en revanche, échaffaudée sous les tribunes.
On suppose que cette dernière est dévolue aux compétiteurs.
Néanmoins, à l'opposé de l'arche, sis sur la face occidentale,
l'édifice olympique ne comporte aucune tribune.
On a pu évaluer que la construction dédiée au sport possède une
capacité d'accueil d'environ 11 200 spectateurs — en tenant
compte d'une envergure moyenne de 40 centimètres par individu —.
- Le complexe olympique est également agrémenté d'une piste
destinée à la course à pied. D'autre part, on peut observer qu'il
est doté d'un terre-plein central dévolu à diverses épreuves
physiques. Enfin, il faut souligner que le complexe est ouvragé à
même l'environnement rocheux, probablement par le biais d'une
technique d'excavation, à l'instar du bassin situé dans l'enceinte
du sanctuaire de Melkart,.
- En dépit de son contexte d'édification, il est important de
préciser que son architecture n'est indubitablement pas de
typologie grecque et/ou romaine. D'après les analyses et les
conjectures établient par l'archéologue français Ernest Renan dans
son rapport de fouilles de 1860, l'édification du stade présente
toutes les caractéristiques d'un ouvrage architectural phénicien,
non seulement en regard de sa disposition générale, mais également
en raison de son plan transversal.
- À l'instar de la globalité des stades olympiques dont elle est
le prélude, l'arène d'Amrit se conforme aux critères de mensuration
de ce type d'édifice. La construction possède une diagonale de
600 pieds, soit 192,27 mètres. Par ailleurs, l'arène olympique
est pourvue d'une longueur de 220 mètres, pour une largeur de 30 mètres.
Le rôle religieux
du stade phénicien
Vraisemblablement, les dévots du sanctuaire phénicien, viennent
s'y exercer ou encore s'y mesurer après avoir observer les rites
cérémoniels et les pratiques ablusives. La construction olympique
associée au bâtiment religieux tout proche, met en exergue la
corrélation existant entre la compétition sportive et le culte de
Melqart/Héraclès. Rappelons par le biais de cette proposition,
qu'Amrit est rebaptisée Marathus au cours de
la période hellénistico-romaine, et également que ce toponyme est
ultérieument usité lors de la fondation la ville homonyme grecque.
Ceci marque un témoignage de l'exportation du rite
olympico-religieux dédié à Melkart/Héraclès.
Les sites et
structures funéraires d'Amrit
L'emplacement des nécropole: une configuration spatiale
originale
À la périphérie du site d'Amrit des nécropoles de grande tailles
forment, associées aux zones d'extraction des ramleh, une
sorte de croissant entourant l'aire médiane occupée par le tell et
le sanctuaire dédié à Melqart. On peut établir un parallèle entre
cette configuration géographique spécifique au site littoral
nord-syrien, et celle
tout aussi unique du site beaucoup plus méridional de Sidon. Ce dernier
apparaît le seul dont le plan quartier par quartier soit
similaire.
Une grande variété des origines ethniques et géographiques des
défunts
- Après examen par recoupement et études archéologiques, on a
attesté que ces nécropoles abritent les restes de défunts
originaires de l'Île d'Arados — petite terre baignant dans la
mer Méditerranée et située en face de la côte d'installation
d'Amrit. En outre, on émet l'hypothèse que les vastes complexes
funéraires accueilleraient en leur sein les ossements de pèlerins
vouant un culte au dieu Melkart.
- Par ailleurs, les fouilles entreprise sous la direction de
Michel Al-Maqdissi in situ des stèles funéraires localisées
dans les différentes enceintes mortuaires, ont permis de mettre au
jour plusieurs types de mobilier funéraires. De facto, les
artéfacts et les reliques et/ou objets antiques constituants les
viatiques se présentent tels des statuts sociaux des
défunts. L'analyse, l'énumération et l'identification de biens
funéraires, induisent à déterminer des positions hiérarchiques
et/ou patrimoniales extrêmement variées.
Une diversité des
types de nécropoles
- Au sein de la plupart des complexes mortuaires, les fosses
funéraires dévolues à chaque défunt sont ouvragées à partir de la
pierre rocheuse propre à Amrit, se présentant alternativement de
plain pied au sol ou accompagnées d'un bloc monolithique
commémoratif doté d'une stylistique épurée.
- En outre, dans la zone septentrionale du site phénicien, les
équipes d'archéologues ont mis au jour une nécropole de
typologie hybride, c'est-à-dire que les classiques tombeaux
rocheux côtoient des chambres funéraires pourvues d'un sarcophage
de forme grossièrement humaine façonné soit en marbre, soit
simplement en argile cuit.
- Pour autant, la diversité des types de nécropoles ne se résume
pas à ces seuls points notables. On a d'autre part mis au jour des
sites funéraires sis dans les aires méridionale et
méridio-orientale d'Amrit, distinctes au regard des
caractéristiques des tombes les dotant. Au sein de ces zones
circonscrites, les fouilles ont notamment révélé ce que l'on peut
créditer comme étant une nécropole royale. Celle-ci possède quatre
hypogées — autrement dit, des constructions souterraines
funéraires œuvrées par excavation et terrassement, lesquelles sont
généralement munies d'un couloir d'accès, d'une chambre funéraire
et parfois, d'une anti-chambre —. Ces quatre ouvrages
funéraires remarquables, également appelées méghazils dans
la région du nord-ouest syrien, sont chacun flanqué de quatre
sculptures de lion.
- La dernière nécropole chronologiquement recensée — datée
de la basse-période phénicienne —, également dénommée
Nécropole de Bayada, est localisée dans la partie orientale
du site d'Amrit. Plus homogène que les complexes funéraires
antérieurs, cette dernière propose un panorama global constitué
uniquement de simples monolithes de pierre dressés, surplombant
chacun de ses caveaux funéraires.
Une galerie funéraire
remarquable
Se plaçant en vis-à-vis de la Nécropole de Bayada, on
peut noter la présence d'une butte naturelle. Cette dernière est
pourvue de deux hypogées, lesquelles apparaissent, factuellement et
de manière inédite, non souterraines mais excavées directement dans
ladite butte sous forme d'une double galerie. La galerie, creusée à
flanc de roche, se sépare en deux parties distinctes au moyen d'un
arc situé juste à l'entrée de l'ouvrage mortuaire. Chacune de ces
deux sous-galeries se place exactement dans la ligne médiane formée
par le dromos — en archéologie spécialisée à la civilisation
phénicienne, ce terme désigne le couloir d'entrée à(aux) chambre(s)
funéraire(s) —.
Dans le rapport de fouilles effectuées en 2003, l'archéologue
Michel Al-Maqdissi, nous fournit de plus amples détails
concernant la galerie. - Il observe que l'arc de séparation des
deux segments est soutenu par deux colonnes faisant office de
soubassements;
- L'archéologue décrit le premier segment de galerie comme étant
dans le prolongement du dromos
- Ce segment se pourvoit de quatre portées creusées dans les flancs
muraux de celui-ci. Un caveau funéraire est incorporé à chacune des
portées. Directement posées à terre, et situées au-devant des
quatre rangées tombales, on peut remarquer deux statues
anthropomorphes façonnées par technique de sculpture dite de
ronde-bosse. Ces sculpture ronde-bosselées en buste
— debout —, figurent deux personnages l'un féminin et
l'autre masculin. On estime qu'elles représenteraient probablement
les commanditaires de la construction mortuaire;
- Le second segment est situé, quant à lui, dans la partie finale
de l'excavation terrassée. Il se compose essentiellement d'une
riche salle semi-circulaire, dont le centre est occupé par trois
sarcophages. Ces derniers, d'excellente facture artisanale, sont
assignés au début du IIe siècle — autrement dit, au cours de
la période consignant la Syrie à un statut de
province romaine —. De facto, on relève que les trois ouvrages
funéraires sont façonnés dans un style typique
syrio-hellénistique.
La
Maison des ancêtres
Antérieurement remarquée par l'archéologue Ernest Renan
lorsqu'il entreprend les fouilles de 1861, la toute dernière
construction mortuaire mise au jour — au cours de la campagne
de fouilles de 2010 —, est localisée au sud-est de la
Nécropole Royale. Il s'agit d'un bâtiment ouvragé dans la pierre
rocheuse, laquelle est propre au site d'Amrit. Sa façade
s'agrémente de genre de renfoncements faisant probablement office
de caveaux funéraires,. En outre, on distingue de nombreuses
représentations sculptées et ciselées — dits
nefechs —, apparaissant également sur le fronton de
l'édifice et généralement associées aux cavités mortuaires. On
estimerait que la structure funéraire dénommée Maison des
Ancêtres serait un lieu d'accueil des dépouilles de défunts. On
suppose que celle-ci participerait d'une sorte de rite d'hommage
aux disparus,. Placés sur l'un des côtés du tombeau collectif,
d'autres renfoncements s'offrent au regard. Néanmoins, ces derniers
sont de type votif, a contrario des cavités creusées en façade.
Amrit: une agglomération proto-urbaine destinée au culte
religieux
Panorama du
site
Le complexe antique se présente comme une vaste concentration de
bâtiments et d'édifices dont les destinations d'usage sont
diverses. Ce dernier, localisé au sud-est de la ville de Tartous, s'étend le
long du littoral syrien sur
approximativement 7 kilomètre,
pour une largeur maximale d'environ 2 kilomètre. En son milieu, l'aire antique est
en grande partie couverte par les infrastructures du temple de
Melqart, du stade olympique, des carrières et de l'édifice
d'agrément des officiants religieux. Le complexe antique phénicien,
ne peut être considéré comme étant un site de typologie urbaine. Au
contraire, il présente l'ensemble des caractéristiques d'un lieu
proto-urbanisé. Ce dernier se compose d'une certaine
quantité de groupes d'habitats disséminés sur la globalité de son
aire d'édification,. En outre, la faiblesse des infrastructures de
voirie — quelques artères d'acheminement tout au plus —,
suggère le postulat d'une population de taille minimale qui serait
probablement inférieure à celle d'un village de la période de l'Âge
du Fer II,,.
Le port
On a récemment découvert, situé dans la zone périphérique
occidentale des ruines antiques, une petite infrastructure
portuaire directement en vis-vis de l'Île d'Arados, laquelle est
distante de 800 mètres. On estime
que le complexe portuaire fait office de point d'accès aux
populations îliennes, mais est également usité pour le transport
maritime des fameuses ramleh extraites des carrières sises à
Amrit,,.
Les bâtiments des
officiants cultuels
En lieu et place du tell mentionné précédemment, l'une des
couches stratigraphiques étudiée par Michel Al-Maqdissi et
l'équipe archéologique nous fournit un constat et une
interprétation sans équivoque: celle-ci est constituée de vestiges
d'un pied-à-terre dévolu aux prêtres. Attribué au courant du
VIe siècle av. J.-C., la
construction domestique est concrètement contemporaine du
Sanctuaire dédié à Melqart. Il se présente sous la forme d'un
parallélépipède dont l'architecture est épurée et sans fioriture.
Outre ce logis de bonne taille, la recherche stratigraphique opérée
sur le promontoire artificiel, révèle également l'existence de
petits lieux d'habitation se superposant au bâtiment destiné aux
personnalités officiantes, et assignable à une époque plus récente.
Cette observation indique clairement une forme de pérennité d'une
zone d'habitat — toutefois, de surface peu importante — à
proximité du temple élevé en hommage du Dieu Guérisseur
Phénicien,.
Les groupes d'habitats
proto-urbains
Les nombreuses estimations archéologiques effectuées par
technique de sondage sur l'ensemble du site antique d'Amrit,
démontrent une occupation d'aires d'habitats très faible.
Totalement absente entre les emplacements funéraires et le centre
religieux — exception faite de l'édifice destiné aux prêtres
et de logements de villégiature situés non-loin —, l'essentiel
des lieux de vie identifiés au sein des ruines phéniciennes, se
concentre le long du rivage méditerranéen, au voisinage du petit
port d'agrément évoqué auparavant. Ces petites unités d'habitation
ne constituent pas, en la demeure, d'un site urbain potentiel tels
qu'une ville, voire également un village à l'époque étudiée. Au
mieux, ces groupes d'habitats semblent plutôt déterminer une
amorce préurbanistique, autrement dit une typologie
proto-urbaine. Cette assertion corrobore la thèse qu'Amrit est
avant tout un lieu de pèlerinage,,,.
Une agglomération antique riche, mais néanmoins en
danger
- Comme nous l'avons déjà évoqué auparavant, les vestiges du site
phénicien d'Amrit proposent une perspective d'ensemble riche et
originale. Riche de par sa diversité de structures architecturales
et de l'enseignement historique, religieux et traditionnel qu'elle
promeut et met en évidence — le sanctuaire de Melqart/Héraclès
et du culte qui lui est associé; variété des nécropoles —.
Originale, en regard de son aspect précurseur — notamment le
stade olympique — et également en raison des concepts
d'édification architecturaux uniques — utilisation des pierres
calcaires dites ramleh; agencement et organisation spatiales
des structures représentant les différentes fonctionnalités de
l'agglomération d'Amrit —.
La situation géographique des ruines d'Amrit, c'est-à-dire en
bordure du littoral méditerranéen, la place en marge des incursions
et des raids de l'E.I. et des guerres civiles qui frappent
l'État Syrien depuis
2009.
- Pour autant, le patrimoine antique unique que sont les vestiges
d'Amrit font l'objet de deux fléaux depuis 2014.
- les monuments, éléments, artefacts et reliques constituant
l'agglomération phénicienne quinquamillénaire sont l'objet de
pillages et de trafics de pièces antiques, indéniablement pérennes
et destructeurs,.
- Un projet balnéaire a vu le jour en 2010, situant une station
estivale en lieu et place d'une bonne partie de l'ancien site
phénicien. Michel Al-Maqdissi — nota bene:
l'actuel Directeur des Recherches et des Fouilles en Syrie —
nous en fait part et nous en alerte. Il précise que ledit projet
est le résultat d'un accord passé entre un important consortium
immobilier et l'État syrien. L'archéologue en chef syrien nous
rapporte également que les terrains attenants à la quasi-globalité
de l'aire d'occupation des vestiges d'Amrit sont rachetés en 2010,
afin d'édifier les structures balnéaires. Enfin, Michel
Al-Maqdissi, rappelle la difficultés et les contraintes
auxquelles celui-ci et son équipe sont soumis pour mener à bien les
fouilles et les recherches attenantes et in situ d'Amrit.
Bibliographie
- Paule Valois,
« Amrit : Les révélations des dernières fouilles »,
Archéologia, Éditions Faton, no 536, octobre 2015,
p. 35, 36, 37, 39, 40 et 41
- Michel Al-Maqdissi, « AMRIT, OU L'ARCHÉOLOGIE DE
LA PEUR », Archéologia, Éditions Faton, no 536,
octobre 2015, p. 38 et 39
- Émile Puech,
« Les inscriptions phéniciennes d'Amrit et les dieux
guérisseurs du sanctuaire », Syria, Persée,
vol. 63, no 3-4, 1986, p. 327-342 (DOI ,
lire en ligne)
- Carine Mahy,
« Le Maabed d'Amrit »,
(carine-mahy/s/les-articles-histoire-de-carine-mahy/), 18
février 2011 (lire
en ligne)
- lire en ligne
[1]
- Michel Al-Maqdissi, « Note sur l'architecture
religieuse en Phénicie septentrionale », LA REVUE
PHÉNICIENNE, La revue phénicienne, février 2014, p. 1 à
11 (lire
en ligne)
- lire en ligne
[2]