Le parc archéologique de Paphos est situé dans la ville
de Paphos à l'ouest de Chypre. Également désigné sous le nom de
Kato Paphos, on y trouve les vestiges de l’ancienne Nea
Paphos, dont la divinité principale était la déesse Aphrodite. Bien
qu'occupé depuis le Néolithique, le parc archéologique est
constitué de sites archéologiques datés de la période
hellénistique, de la période romaine et de la période byzantine.
Les fouilles archéologiques menées sur le site de façon régulière
depuis 1962 par le Département des Antiquités chypriote ont permis
la découverte de bâtiments publics (odéon, agora...), de bâtiments
religieux et de villas privées. Les vestiges du parc dont des
pavements mosaïques exceptionnels, ainsi que d'autres sites
répartis dans la ville de Paphos sont inscrits sur la Liste du
patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1980. Plusieurs missions
archéologiques dépendant d'universités ou d'institutions étrangères
interviennent régulièrement.
Histoire de Paphos (Nea
Paphos)
La ville de Paphos, ou Nea Paphos, est située le long de la côte
sud-ouest de l'île de Chypre, sur un léger promontoire naturel.
Selon les sources anciennes, la ville aurait été fondée à la fin du
IVe siècle av. J.-C. par
Nicoclès, le dernier roi de Palaeopaphos (l'ancienne ville de
Paphos) située à quelque 16 km plus à l'est. Le choix de
l'emplacement fut dicté par la présence d'un port naturel et sa
proximité du port d'Alexandrie en Égypte. Au début du IIIe siècle av. J.-C., Chypre est sous
domination ptolémaïque. Nea Paphos devient alors le centre de
l'administration ptolémaïque. À la fin du IIe siècle av. J.-C., Nea Paphos devient
la capitale politique et économique de l'île tout entière.
En 58 av. J.-C., lorsque Chypre passe sous domination romaine,
Nea Paphos reste la capitale de l'île. Elle le restera jusqu'au
terrible tremblement de terre du IVe siècle apr.
J.-C. et au transfert de la capitale à Salamine, renommée
Constantia à cette occasion. Nea Paphos restera malgré tout très
influente sur l'ensemble de l'île. Après les raids des Arabes au
VIIe siècle, Nea Paphos entre dans
une phase de déclin. La ville reprend de l'importance au cours de
la période byzantine et médiévale, mais à la période vénitienne la
côte est délaissée voire abandonnée et la population s'installe à
quelques kilomètres dans les terres dans la ville actuelle de
Paphos (Ktima).
Description des vestiges
Situé à quelques mètres du fort de Paphos, le long du port, le
parc archéologique de Paphos donne accès à des vestiges
variés : plusieurs villas, un odéon, une agora, une
citadelle... Après le hall d'accueil, quelques marches mènent à un
ancien entrepôt à caroube dans lequel des expositions temporaires
sont régulièrement organisées. Un film présente l'histoire et
l'archéologie de Paphos.
La villa de
Dionysos
La villa de Dionysos, luxueuse résidence romaine, est érigée à
la fin du IIe siècle et détruite
par un tremblement de terre au IVe siècle. Elle est construite par-dessus des
bâtiments plus anciens. Le plus ancien bâtiment était un sanctuaire
taillé directement dans la roche, d'une surface totale d'environ
2 000 m2, dont 556 m2 sont couverts de pavements
mosaïques de très grande qualité. On l'appelle villa de Dionysos
car plusieurs mosaïques représentent des scènes mythologiques en
rapport avec le dieu Dionysos. Toutes les mosaïques sont à leur
emplacement d'origine sauf celle de Scylla. La villa a été fouillée
de 1962 à 1965 par Dr. Kyriacos Nikolaou, conservateur au
Département des Antiquités chypriotes.
Description :
- Mosaïque hellénistique (fin du IVe siècle av. J.-C. ou début du
IIIe siècle av. J.-C.)
- Mosaïque de Scylla (pièce 1) : située à l'entrée de la
villa, cette mosaïque appartenait à un bâtiment antérieur, daté de
la période hellénistique, situé sous la villa de Dionysos. Pour
pouvoir être présentée au public, la mosaïque que l'on voit
actuellement n'est pas à son emplacement d'origine. On y voit le
monstre Scylla, le monstre marin mythique mi-femme, mi-poisson,
mi-chien. Elle est représentée brandissant un mât de bateau et un
trident dans une scène évoquant l'univers aquatique.
- Mosaïque romaine (fin du IIe siècle ou début du IIIe siècle)
- Mosaïque de Narcisse (pièce 2) : représentation de
Narcisse admirant son reflet dans l'eau du lac.
- Mosaïque des Quatre Saisons (pièce 3) : la partie centrale
est composée de neuf panneaux. Les panneaux avec les figures
humaines sont :
- Panneau central : une figure indéterminée, peut-être
Dionysos, Aiôn ou une personnification de l'Année
- Panneau supérieur gauche : représentation de l'été
- Panneau supérieur droit : représentation du printemps
- Panneau inférieur droit : représentation de l'automne
- Panneau inférieur gauche : représentation de l'hiver
- Mosaïque du Triomphe de Dionysos (pièce 4) :
- Panneau du triomphe de Dionysos : premier panneau, situé à
l'extrémité ouest de la pièce, représentant la scène mythologique
du retour triomphal du Dieu après sa campagne militaire en Inde,
d'où il rapporte des esclaves et des panthères. Dionysos, portant
une couronne de feuilles de laurier, est assis sur un chariot à
deux roues tiré par deux panthères, dont Silène tient les rênes.
Ils sont suivis d'un cortège formé de Pan, d'un esclave indien
ligoté et de deux Bacchantes.
- Deux petits panneaux des Dioscures : situés de part et
d'autre de la mosaïque, Castor et Pollux, tous deux en tenue
militaire, portent une lance et tiennent les rênes de leurs
chevaux.
- Panneau central : scène de vendange
- Mosaïque géométrique (pièce 5)
- Mosaïque de Phèdre et Hippolyte (pièce 6 - fin du IIe siècle ou début du IIIe siècle) : à gauche de la scène de
chasse on voit Hippolyte accompagné d'un chien. Il semble
embarrassé à la lecture de la lettre d'amour de sa belle-mère,
Phèdre. Celle-ci est représentée à droite de la scène, assise sur
un trône, inquiète dans l'attente de la réaction du jeune homme. La
passion de Phèdre est illustrée par la flèche enflammée que Cupidon
dirige vers son cœur.
- Mosaïque géométrique (pièce 7) : motifs géométriques et
objets du quotidien
- Mosaïque du rapt de Ganymède (pièce 8) : représentation de
la scène mythologique du rapt de Ganymède, dans laquelle Zeus,
ayant pris l'apparence d'un aigle, emporte Ganymède.
- Mosaïque géométrique (pièce 9) : motifs géométriques en
forme d'étoile et de carrés décorés de figures en croix, de
losanges, de peaux, de nœuds de Salomon, de roses, de
palmettes.
- Mosaïque de Chasse (pièce 10) : la scène représente un
chasseur face à un lion, pendant qu'un autre cochon. De l'autre
côté, un âne sauvage est représenté la tête coupé et un léopard
tenant la tête d'un autre animal dans sa gueule.
- Mosaïque de Chasse (pièce 11) : on y voit un chasseur et
un chien mordant la patte d'un âne sauvage. Un autre chasseur fait
face à un léopard. Un ours, un cochon sauvage, un mouflon et un
tigre sont aussi représentés.
- Mosaïque de Chasse (pièce 12) : scène représentant un
autel entouré d'arbres, un tigre et un cerf et un chien courant
vers eux. Un chasseur équipé d'une lance face à un lion et un autre
chasseur face à un taureau agressif.
- Mosaïque géométrique (pièce 13) : motif de treilles
- Mosaïque géométrique (pièce 14) : mosaïque composée de
seize petits panneaux représentant chacun un motif géométrique
différent.
- Mosaïque du Paon (pièce 15) : le panneau central de cette
mosaïque représente un paon à queue bleue faisant la roue.
- Mosaïque à quatre panneaux (pièce 16) : de gauche à droite
les panneaux représentent les scènes mythologiques suivantes :
- Panneau de Pyrame et Thisbé : à gauche de la salle, ce
panneau représente la scène mythologique d'amour entre Pyrame et
Thisbé. Dans l'angle supérieur droit, à la place du portrait de
l'amant de Thisbé c'est le dieu Pyrame qui est représenté. Thisbé
se tient sur la gauche. À l'arrière-plan, un tigre tient le voile
ensanglanté de Thisbé.
- Panneau d'Icare et Dionysos : Dionysos et la nymphe Acmé à
demi-nue sont représentés sur la partie gauche. Au centre, Icare
tient les rênes d'un char à deux-roues tiré par des bœufs, chargé
d'outres de vin. Plus loin à droite, on voit deux bergers en état
d'ébriété et une mention en grec « ΟΙ ΠΡΩΤΟΙ ΟΙΝΟΝ
ΠΙΟΝΤΕC », soit « Les premiers buveurs de
vin ».
- Panneau de Poséidon et Amymone : représentation du mythe
de Poséidon et Amymone avec Éros situé entre eux deux.
- Panneau d'Apollon et Daphné : scène mythologique
représentant Apollon et Daphné et sa transformation en laurier-rose
par son père Pénée.
La
villa d'Orphée
La villa d'Orphée : comme la maison de Dionysos cette villa
gréco-romaine luxueuse est organisée autour d'une cour centrale.
Elle est datée de la fin du IIe siècle, début du IIIe siècle. Le sol de la villa est décoré de
trois mosaïques.
- Mosaïque d'Orphée : dans la pièce principale, la pièce de
réception est décorée d'une scène figurant Orphée entouré
d'animaux.
- Mosaïque d'Hercule et du lion de Némée
- Mosaïque d'une Amazone et de son cheval
La
villa de Thésée
La villa de Thésée : les vestiges actuellement visibles
correspondent à une luxueuse villa érigée dans la seconde moitié du
IIe siècle et habitée jusqu'au
VIIe siècle, construite sur les
ruines de villas plus anciennes (hellénistique et romaine). La
dimension exceptionnelle de cette villa (plus de 100 pièces) et le
luxe de son décor conduisent à considérer qu'il s'agit de la
résidence du gouverneur romain de Chypre. Le sol de nombreuses
pièces, trois des quatre portiques autour de la cour centrale sont
recouverts de pavements mosaïques avec des motifs géométriques.
Trois pièces de l'aile sud du bâtiment sont décorées de mosaïques
figuratives appartenant à des phases différentes d'évolution du
bâtiment.
- Mosaïque de Thésée et du Minotaure : datée de la toute fin
du IIIe siècle ou du début du
IVe siècle, des restaurations
postérieures sont visibles, elles ont probablement été effectuées
après les tremblements de terre de la moitié du IVe siècle.
- Mosaïque de Poséidon et Amphitrite : datée de la fin du
IVe siècle elle est installée dans
ce qui devait être une chambre à coucher.
- Mosaïque du bain d'Achille : datée du début du
Ve siècle, elle est installée dans
une salle de réception de la villa.
La villa
d'Aiôn
La maison d'Aiôn : une partie seulement de la domus
a été dégagée pour le moment. Le sol du triclinium (salle à
manger ; salle de réception) est recouvert par l'une des plus
spectaculaires mosaïques de Nea Paphos.
- Mosaïque dans un grand triclinium : cette mosaïque d'une
très grande qualité est datée, post quem, de 318 ap. J-C..
Elle est composée de cinq panneaux représentant :
- L'enfance de Dionysos
- Leda et le Cygne
- Le concours de beauté entre Cassiopée et les Néréides
- Condamnation à mort de Marsyas par Apollon
- Le triomphe de Dionysos
- Mosaïque géométrique
L'acropole et l'agora
- L'agora : seules les fondations de cette cour entourée de
quatre portiques sont actuellement préservées.
- Odéon et Asclépiéion : à l'ouest de l'agora de Paphos on
trouve plusieurs bâtiments bien conservés datant du IIe siècle. L'odéon, restauré par le
Département des Antiquités chypriotes, est encore utilisé
aujourd'hui pour l'organisation d’événements culturels.
- L'acropole : à l'ouest de l'odéon, le promontoire naturel
sur lequel est installé un phare moderne présente des traces de
murs. Les recherches archéologiques n'ont pas encore été menées sur
ce secteur.
Le château de
Saránda Kolónes
Le château de Saránda Kolónes (Quarante colonnes) :
ce château de la période byzantine est situé près du port, au sud
de l'agora. Construit au VIIe siècle, il protégeait le port et la cité
de Nea Paphos contre les invasions arabes. Il est resté en service
jusqu'à sa destruction par un tremblement de terre en 1223.
Voir
aussi
Bibliographie
- Marek Titien Olszewski, «The iconographic programme of
the Cyprus mosaic from the House of Aion reinterpreted as an
anti-Christian polemic », Et in Arcadia Ego. Studia
memoriae professoris Thomae Mikocki dicata, (in:) W.
Dobrowolski (ed. by), Warsaw:, 2013, p. 207-239; Pls 74-86. [[ lire
en ligne]]
- (en) Vassos Karageorghis, « Ancient Cypriote Art in the
National Archaeological Museum of Athens », compte-rendu de
Claire Balandier, Cahiers du Centre d'Etudes Chypriotes,
Année 2003, Volume 33, n° 1, 2003, pp. 307-308.
- Claire Balandier, « Du nouveau sur la capitale
hellénistique et romaine de Chypre : premiers résultats de la
Mission archéologique française à Paphos [MafaP]
(2008-2012) », Dialogues d'histoire ancienne, Année
2012, Volume 38, n° 2, pp. 151-164.
- Claire Balandier, « La défense des territoires à Chypre de
l'époque archaïque aux invasions arabes (VIIIe s. av. n.è. - VIIe
s. de n.è.) », Dialogues d'histoire ancienne, Année
2002, Volume 28, n° 1, pp. 175-206.
- Claire Balandier, « Paphos capitale européenne de la
culture », Archéologia, n°557, septembre 2017, pp.
50-57.
- Claire Balandier, « Fondation et développement d'une ville
chypriote de l'Antiquité à aujourd'hui. Approches archéologiques
historiques et patrimoniales », in Actes du colloque
international tenu à Avignon du 30 octobre au 1er novembre
2012, Mémoires n°43, Ausonius Éditions.
- A. M. Guimier-Sorbets, D. Michaelides (dir), « Chypre à
l'époque hellénistique et impériale. Recherches récentes et
nouvelles découvertes. Actes du colloque tenu à Nanterre-Paris
(25-26 septembre 2009) », Cahier du Centre d'Études
Chypriotes, n° 39, Éditions du Boccard, 2009.
- Claire Balandier, B. Imhaus, E. Raptou, et M. Yon (dir),
« Kypromedousa. Hommage à Jacqueline Karageorghis »,
Cahiers du Centre d'Études Chypriotes, n° 45, Éditions du
Bocard, 2015.
- « Chypre », Dossiers d'archéologie, n°205,
juillet-août, 1995.
- J. Durand, D. Giovannoni (dir), Chypre entre Byzance et
l'Occident, IVe - XVIe siècle, Le Louvre Éditions, 2012.
- Eric Morvillez et Claire Balandier, « Nouvelles recherches
archéologiques à Paphos : premiers résultats de la mission
française sur la colline de Fabrika (2008-2009) », Cahiers
du Centre d'Études Chypriotes, Année 2009, Volume 39, n° 1, pp.
425-447.
Liens
externes